Douleur. C’est tout ce qui reste, tout ce qu’il est. Disparu Maverick Reed. Il n’y a plus de place que pour la souffrance. Omniprésente, elle devient son univers, son présent, son passé et son futur. Chaque molécule de son corps ne vit plus que pour le supplice. A chaque instant, ce n’est qu’os brisés et peau qui se déchire, articulations qui se déboitent et membres liquéfiés. Hurlements et râles, calvaire et désespoir. Comment est-ce possible ? Comment cela peut-il seulement exister ? Est-ce les Enfers ? Mais pourquoi serait-il aux Enfers ? Et quels Enfers ? Ceux des Catholiques avec les flammes éternelles qui brûlent sans cesse ? Il brûle oui. Son corps fond, son sang est du plomb en fusion. Mais en même temps, il tremble, il gèle. Est-ce le Helheim viking où tout est sombre et sans but ?Que lui arrive-t-il ? Que s’est-il passé pour qu’il aboutisse là où il en est, à subir cette épreuve ? Et dire que son bureau aux archives était dans un foutoir pas possible. Il allait encore se faire engueuler par son supérieur …. Ca ne serait pas la première fois ni même la dernière, d’ailleurs. Mais attendez une seconde … Son bureau ? Mais il n’a pas de bureau ! Qu’est-ce-qu’….??!!

Ses pensées s’écrasent, coupées en pleine débandade par une nouvelle vague d’agonie. Bientôt, il n’entend plus ses cris. A-t-il arrêté de s’égosiller ? Non. C’est simplement qu’à force d’être soumises à tant de violence, ses cordes vocales déclarent forfait. Il s’époumone à présent, sans son, comme un mime ferait une représentation. Mais l’horreur est toujours là, toujours aussi forte, aussi tonitruante, aussi indescriptible. Il est un poisson hors de l’eau qui cherche à tout prix à respirer, à retrouver un semblant de vie. Mais ça vie, à présent, c’est ça. Ces écartèlements intérieurs, cet restructuration - déstructuration continuel de son être qui fait qu’il ne sait plus qui il est. Où est-il, que fais-t-il ? Des questions sans but ni raison. Des divagations perpétuelles pour tenter d’échapper à cette emprise que le mal, la souffrance à sur lui. Quelque chose le vole, le dépouille de ce qui était, de ce qui avait toujours fait qu’il était lui. Pour en faire quoi ? Dans quel but, pour quelles raisons ? Il ne sait pas, il ne comprend pas. Il se noie sans eau, entraîné toujours plus profondément dans la tourmente.Va-t-il toucher le fond ? Y a-t-il seulement un fond ? Peut-il sortir de ce gouffre ? Que faut-il faire pour cela ?

Lui en train d’affronter une bande de sales garnements en classe élémentaire alors qu’il a 10 ans. Lui voyant deux taureaux se faisaient violemment front. Lui poussant un round baller de toute ses forces, faisant saillir ses muscles alors qu’il travaille au Ranch. Lui observant des fresques amérindiennes montrant deux tribus se faisant la guerre.

Là ?! Qu’est ce que c’était ? Toutes ses images du passé, venant de son propre cerveau, de son vécu.  Qu’est ce que cela veut dire ? Est-ce un signe ? Son subconscient essaie-t-il de lui dire quelque chose ? Se battre ? Il doit se battre ? Mais pour quoi ? Contre quoi ? C’est trop dur, trop douloureux. Il ne sait pas, il ne sait plus, il est perdu. Plus rien n’a de sens ni de raison. Ça ne veut rien dire. Pourquoi cela ne peut-il tout simplement pas s’arrêter, même si ça signifie le néant. Tout ou n’importe quoi pourvu que ça finisse et que ça ne revienne jamais. Car lorsque Maverick pense que la tourmente faiblit, elle repart de plus belle, le brûlant sur son passage, l’écharpant comme une meute affamée, pour ne laisser que son âme à nue, à vif. Il ne sait même pas comment cette dernière peut encore exister. C’est vain ! C’est comme vouloir lutter contre la marée, le lever de soleil ou le passage des heures.

Lui voyant son père adoptif secouer vigoureusement la tête pour dire non. Lui face à un professeur lui faisant répéter un exercice jusqu’à ce qu’il y arrive. Lui encourageant un camarade à ne pas abandonner lors d’une course. Lui, heureux, en voyant un poulain naître et se mettre debout sur ses pattes pour la première fois. Lui souriant devant les feux d’artifice du 4 juillet;

Ça recommence. Toutes ces images, toutes ses émotions qui se battent en lui. Comme si elles lui foncent dessus pour le forcer à réagir. Elles le harcèlent sans relâche telle une meute de loup qu’il doit affronter sur chaque front, à chaque instant, s’il ne veut pas s’écrouler définitivement. Même si elles lui appartiennent, qu’elles sont son vécu, il a l’impression que c’est quelqu’un d’autre qui les commande, qui leur somme de s’imposer à lui. Pendant quelques secondes, elles mettent la souffrance de côté, comme une barrière protectrice. Elles lui permettent de se rappeler qu’il existe autre chose, qu’il y a d’autres solutions. Et qu’il n’a jamais baissé les bras. Pourquoi commencerait-il maintenant ? Un hurlement monta en lui. Mais il était différent. Il n’était pas plein de douleur et de torture. Au contraire, il était plein de vitalité et de rage de vaincre, lui forçant à ouvrir les yeux aussi grands que sa gorge déployée.

BATS-TOI !