Avec Serena Colucci 🩶

Serenade for a Vampire

J'ai hâte de rentrer chez moi, retrouver ma belle île Avalonienne ou les artifices n'existent pas.

J'ai hâte de retrouver mon mode de vie simple, dépourvu de technologie, avec mes amis, mes parents, et le printemps naissant.

Mais en attendant, ce soir, je me fais chier.

J'ai du trouver un consensus pour satisfaire le peu d'amis sorcier que je me suis fait.

A coup de "Mais si Eris tu vas voir, on va te montrer la beauté de notre monde", "Promis si tu voyage un peu tu verras des paysages plus beaux que ceux que tu as connu", "Aller prends cette semaine et laisse nous te montrer." pour essayer de me convaincre de partir en vacances avec eux. Sauf que je n'avais pas envie de perdre cette semaine en tête à tête avec ma famille, pas plus que je n'avais envie de visiter l'Autre monde.

Alors voilà, j'ai accepté de partir un week end, un simple week end avec eux.
Par chance, les portails nous permettent de voyager rapidement, de ne pas perdre de temps et donc de se retrouver en un instant à la destination de nos rêves.

Enfin "nos rêves", c'est bien vite dit.
Les promis paysages spectaculaires sont une suite de bâtiments anciens, mêlés à quelques modernités humaines.
Notre voyage inoubliable ne se fait pas si loin de Fairwood - que je trouve bien plus agréable. Nous sommes partis à Londres.

Nous avons loué une petite chambre pour deux nuit, que nous avons rejoint avant de nous diriger dans le centre agité de la capitale.

Ca grouillait de monde, entre les touristes et les habitants de la ville, il était difficile de profiter de l'air pollué environnant.
J'ai souri pour faire plaisir à mes amis, mais je pense qu'ils n'ont pas saisi l'essence même de ma personnalité.
Mon besoin de tranquillité est mis à rude épreuve.

Encore en ce moment, je suis dans un pub, la musique est forte, les gens sont alcoolisés mais par chance nous sommes dans un pub sorcier. Nos secrets sont bien gardés, aucun de nous ne pourrait gaffer auprès des sans pouvoirs.
Donc, je ne suis pas chaperonne, je peux tranquillement scroller sur Pinterest.

Oui, depuis que Coraline a tenté de me moderniser j'ai téléchargé l'application. Elle est bien, personne se parle, on admire juste les arts des créateurs. C'est bien la seule que j'ai avec l'appli des sorciers. On ne me trouve pas sur insta, je ne vois pas l'intérêt.
Surtout si j'ai déjà Pinterest.

- Eriiiis!

Je relève les yeux d'un air las, c'est déjà la troisième fois.

- Viens danseerrr.

Je sirote mon jus de pomme et refuse poliment de la tête.

Je ne danse pas. Pas la dessus.

*brrr brrr*

Le téléphone en veille s'allume.
J'ai reçu un message. Je baisse les yeux un instant avant de les relever sur Amélia déjà répartie danser avec un inconnu.

Bon.

Qui me parle ?

Je deverouille l'écran d'accueil en dessinant un sigil de protection.

Serena Colluci ?

Elle a peut être pas bien compris les notes que j'ai envoyé avant de partir vers le portail.

Je les ai pas prise avec moi, mince.
Je vais la prévenir quand même, qu'elle sache que je ne la snob pas.

J'ouvre la discussion et tombe sur une drôle de pièce jointe.
Les yeux plissés, je clique dessus avec un air suspicieux.

J'espère qu'elle ne s'est pas fait piratée.

Non, ça ouvre une carte. Un point en Italie. Un pays qui ressemble à une botte, en Europe.

Je relève la tête, je ne suis pas sûre de bien comprendre. Je repose les yeux sur l'écran lumineux. Je zoom.

Elle est dans une ville qui s'appelle Florence.
C'est tout ce que je sais.

Je croise le regard d'Amélia et lui fais signe de venir.

- Dis moi, si quelqu'un t'envoie sa localisation,  sans rien dire, ça veut dire quoi ?
- Ooh Eris ne commence pas avec tes questions, tu as vu ça ou encore ?
- C'est important ou pas ?
- Écoute, à moins que ce soit parce qu'une personne est en dangeeer ou encore au porte de la mort bouuuh, la plupart du temps c'est une mauvaise manip. Tu viens danser maintenant ?!

La sorcière se relève, et retourne dans les bras de son prince.

Elle ne se rend pas compte de l'importance de ma question, ivre de cidre.
Les yeux maintenant rempli d'inquiétude, je termine mon verre, me lève et cours vers l'extérieur.

J'appelle la belle Colucci.

Pas de réponse.

Je retente.

Rien.

Je ne la connais pas bien cette fille, mais je prends peur pour elle. Elle qui a l'air si indépendante et solitaire, j'ai peur qu'il lui soit réellement arrivé quelque chose.
Amélia ne comprendra pas.

Tant pis.

Elle ne remarquera mon absence qu'après sa nuit de folie, je préviendrai les autres une fois à destination indiquée par le téléphone.

Je n'ai pas le temps d'aller chercher mon sac de vêtements, ni même de remettre la clef à quelqu'un.
Je pars vers le premier portail disponible, en tentant désespérément d'avoir une réponse.

Fais chier !!!

Je sillonne les ruelles sombres, sans même me retourner. Je suis devenue proie facile, mais peu importe.

Je cours, encore et encore.

Reprends mon souffle.

Passe le portail, et reprends ma course.

*ding*

Un message ! Serena ?!

"benvenuto in Italia, il tuo pacchetto adesso costa 0,15 centesimi al minuto di chiamata..."

Je souffle, agacée, l'espoir naissant, atomisé.

Une heure et demi de course plus tard, j'arrive dans une ruelle sombre, qui n'a rien de rassurant.

Je suis passée d'un lieu de débauche anglais, à un bar festoyant italien. Ici, pas de magie, juste l'humanité qui vit ses plaisirs.

J'entre et observe les lieux.
A qui m'adresser ?

Le barman ?

- Excusez moi monsieur.

Il n'a pas l'air de bien me comprendre. Je prends mon téléphone, et utilise un traducteur pour me faire comprendre.

- Excusez moi monsieur, vous auriez vu une fille de la vingtaine, cheveux noirs, mi longs, aux yeux clairs ?

Il me sourit bizarrement, regarde sa montre et me fait signe de prendre les escaliers.

- Grazie.

Je monte à l'étage et tombe sur une série de portes fermées.

- Serena ??

Oui bien sûr Eris, elle va répondre.
Je frappe à tout rompre sur diverses portes, des couples en nage étaient à l'intérieur, d'autres personnes répondaient de loin sans venir ouvrir. Seule une porte fermée demeurait silencieuse.

Après m'être faite engueulée par des Italiens, ce silence était presque glaçant.

Après quelques secondes sans entendre un son, je décide de me racharner sur la poignée. Rien ne bouge.

Je tente de donner un coup de pied dans la poignée, je me fais mal. Ca ne marche pas.

L'idée de cramer la porte me vient vite en tête au fur et à mesure que je m'énerve. Mais si je crame cette porte, je vais faire pire que mieux.

Alors je recule de la porte, loin, plus loin, jusqu'à avoir une distance suffisante pour m'élancer et atterrir de tout mon poid contre le bois.

La porte tremble, mais elle ne se brise pas. Je recommence malgré la douleur lancinante qui me parcours le bras. Cette fois, au moment de sauter, j'envoie une bourrasque d'air derrière moi pour me donner une impulsion supplémentaire.

*CRAC BLAM *

- AIE.

Oh la vache. Oh par tous les élémentaires ça fait mal.

Je me redresse doucement, sur les genoux, j'observe les alentours. Il fait noir, tout à l'air vide. Seule une odeur de cigarette parvient à mes narines.

Je me relève et aperçois sur le lit, le corps étendu de la jeune femme.
Elle a l'air si paisible, mais. Mais. Elle ne respire pas.

- C'est pas vrai...

Je m'approche d'elle, prend sa main pour chercher un pouls mais rien. Sa température baisse, son corps ne réagit plus.

Je ne sais pas ce que je ressens, je n'en sais absolument rien, c'est comme si j'étais vide. Tout est vide.
Je comprends qu'elle vient de mourir, que je n'ai rien pu faire pour elle et pourtant je ne réalise pas.

Suis je un monstre de ne pas m'ecrouler de désarroi ? Suis je coupable de ne pas vider mon corps de ses larmes ?

Et si simplement j'essayais de la faire revenir ?

Je sais qu'il est trop tard mais je m'exécute à cette pensée.

Je glisse un bras sous les jambes de la demoiselle, passe le bras dans sa nuque quand je sens mon poignet toucher un liquide visqueux.  

Je m'arrête. Observe son cou et voit deux points rouges.  

- Qu'est ce que c'est ?