L'affaire est dans le sac ! - Ft Alexander Ward - TW langage

D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours été attirée par la mer. Le doux son des vagues s’échouant sur le sable fin, les rayons de soleils se réfléchissant sur l’eau et surtout la sensation que procure l’immensité bleue sur ma peau quand je la rejoins.

C’est au port que je me rends, depuis le centre-ville pittoresque de Fairwood. Mes talons sonnent sur les pavés bétonnés.
Armée de mes plus belles lunettes pour contrer le soleil agressif de l’après-midi, j’arbore comme souvent, l’apparence de la femme riche que je suis.
Riche en confiance, riche en puissance mais surtout riche de matériel. Mon nom ici est Astra Lesath, je suis une descendante de Salem, mais mon statut financier lui porte le nom d’Ellison. Ne soyez pas confus, vous vous y ferez comme je m’y suis faite, accordant plus d’importance aux avantages qu’aux inconvénients que tout cela implique.

Je ne passe plus si souvent à Fairwood, j’aime la ville, mais elle n’est rien comparée au paysage de mon enfance. Quand je me rends ici c’est pour être seule et certaine que l’on ne pourra pas me déranger.

Alors voilà, seule et détendue, je me rends au port avec pour espoir d’enfin trouver le courage de lire les derniers mots que ma mère m’a laissé.

C'est quand que je pense que rien ne peut m’arriver dans une ville aussi tranquille que celle-ci que je me sens propulsée en avant. Bousculée, prête à perdre l’équilibre perchée sur mes plateformes. Je jure et réalise en relevant la tête que ce n’était qu’une diversion.

- Oh l’enflure.

Je cours, il faut à tout prix que je rattrape cet homme qui détient désormais mon sac, mes biens, et surtout la lettre.

- Eh toi !!!

J’aurais dû le voir venir pourtant, mais non, rien, pas un seul avertissement de cet événement, comme si il était destiné à m’apporter quelque chose que je ne dois pas connaitre.

L’agresseur, que dis-je, le voleur se met à zigzaguer entre les passants impuissants.

- Rends-moi mon sac espèce de voleur.

C’est là que je me rends compte que mes pouvoirs ne servent à rien dans l’urgence, je peux essayer de deviner ou il tourne mais ma vitesse ne changera pas.

Je trébuche.

- Woah !!

La chute a été évitée mais le voleur prend de la distance.

- Il va me le payer.

Je souffle, complètement enragée. Je retire mes chaussures dans la précipitation sans le perdre de vue, je dois à tout prix récupérer cette lettre !!

Sans mes chaussures, je gagne le temps que j’ai perdu à les retirer mais ce n’est toujours pas suffisant. Bon sang ce que je déteste me donner en spectacle comme ça.
Mais bon évidemment personne ne va se bouger pour m’aider, ce serait un peu trop sympathique de leur part. Et c’est pas faute de crier l’injustice qui se déroule sous leurs yeux. Après tout, ils doivent se dire que je pourrai bien me repayer un sac, et c’est vrai, mais son contenu n’a aucun prix.

Essoufflée, je ne peux m’arrêter une seconde. Pour reprendre mon dû, ce sera au premier qui commettra une erreur.

Et l’erreur la voici.

De ma distance, j’entends le choc d’un voleur s’écrasant telle une mouche sur la porte arrière du café devant lequel les passants nous dévisageaient. L’image trouble d’un homme à la chevelure blonde sort de ce dit café, qui il est, je ne le vois pas, il s’arrête et s’adresse à la vermine.

J’arrive à leur niveau, les boucles anglaise ébouriffée, le souffle irrégulier mais le teint toujours soigné. C’est ça de savoir choisir son maquillage.

Mes pas ralentissent, je profite du son douloureux émis par le moucheron pour reprendre mon souffle. Observer.

Le blondinet et son café ont l’air de bien profiter de la situation. Ce petit côté sadique me plait.

Arrivée face au pseudo héros de ma journée, je lui esquisse un sourire en remettant quelques boucles en place de ma main libre, en lâchant mes plateformes sur le voleur allongé.

- Ne t’avise plus de bouger.

J’ai la voix ferme, le regard en colère maintenant posé sur lui. Je me détourne du sauveur et me penche vers cet idiot.

- Alors tu es qui toi ?

Autant vous dire que son visage ne me dit rien.

- T’as déjà été arrêté dans ta petite carrière ou alors tu es encore chez les stagiaires des voleurs ? Non parce qu’autant tu as bien choisi ta cible, il faut le reconnaitre, mais passer deux fois par la même zone ?  Vraiment ?

Je secoue la tête.

- T’es vraiment qu’un con.

Je ne lâche pas mon sac souillé par les saletés environnantes de vue, il ne va pas me la faire deux fois.
Je sais que le voleur est plus impressionné par la force debout derrière moi, il a de quoi, et moi je peux en jouer tranquillement.

J’ai envie de lui marcher dessus, de passer mes nerfs sur lui, mais je suis prise de retenue. Serait-ce une dignité mal placée ?

Ceci dit, je me relève tout de même, je fais face au blondinet alors que le moucherons essaies péniblement de se relever. Je pose ma main sur son verre cartonné encore brulant, posant partiellement mes doigts sur les siens.

- Je te revaudrai ça. Je murmure les yeux pleins de charme, alors que je détache le gobelet doucement de sa main.

Je me retourne vivement et vide le contenu visiblement brulant sur le visage rouge de colère de la mauviette.

- Et ça aussi. Dis-je pour le café.

S’en suit la gifle bien méritée au voleur avant que je ne lui hurle de partir avant que je ne fasse pire.
Bien sûr il n’aurait pas le temps de prendre mon sac que je lui sauterais dessus, et je vois dans son regard qu’il le sait très bien.

Bien plus concentrée sur l’agacement de l’amateur de latte, je ne fais plus attention à l’agresseur. Il m’attrape en bégayant :

- T’approche pas ou… ou je l’étrangle.

Il a hésité dans sa menace, il était pas du tout crédible. Réplique à laquelle je réponds agacée par un coup de coude dans le ventre.

Relâchée, je vois le blondinet s’avancer et placarder le mouchard au mur alors que je m’empresse d’attraper mes effets personnels, vérifiant bien que tout s’y trouve.

- Bien fait pour toi. Dis-je en arrière de la scène.

Je replace mes boucles tranquillement, vérifie que mon rouge à lèvre est toujours intacte à l’aide d’un miroir sans plus prêter attention à la scène, du moins en apparence.

- On y va ? Le café n’attend pas !

Je referme mon miroir avec un sourire satisfait et jette un dernier regard au petit voleur.

- Tu feras mieux la prochaine fois.

Je rigole et ouvre la marche vers le précieux et dû café.

- Je ne te pensais pas du genre à prendre du sucre. Dis-je d’un air taquin. Pour quelqu’un qui déteste se taper des queues.

J’arque un sourcil en lui jetant un œil amusé, bien sûr que j’avais entendu sa réplique, et bien sûr que son air arrogant méritait un retour de flamme. C’est ma façon de dire merci il faut croire !  

La file semble avancer rapidement, alors que les mots eux me manquent.

- Juste un café, pas un petit muffin ? Un bagel ? Fais toi plaisir ! C’est moi qui régale !

Je m’avance de quelques pas et note un regard mielleux de la jeune serveuse à mon invité. Je lui souffle la commande et quand elle a le dos tourné, je murmure amusée :

- Eh bien eh bien, ils ont toujours du succès les bad boy à ce que je vois.  

La jeune fille visiblement éprise en avait oublié la moitié de son travail.

- Excusez-moi, ce sera sur place ou à emporter ?

Mais regardez là, elle se mordrait presque la lèvre.

- Ah bah quand même ! Alors Roméo, sur place ou à emporter ?

A en croire ma nouvelle compagnie, la journée est loin d’être gâchée par un mauvais tour d’un vulgaire voleur. Il me fait rire le pseudo héros avec ses commentaires.
Il a de la répartie, il est beau et visiblement personne ne va lui apprendre la nouvelle, il en joue terriblement avec cette pauvre jeune fille.
Je croise les bras et fixe la barista pendant qu’elle s’affaire entre un latté et un capuccino, elle devrait s’en sortir, il n’y a rien de bien compliqué là-dedans.

- Vous n’êtes pas du coin, je me trompe ?
- Mmh ?

Je détourne le regard pour rencontrer celui de mon interlocuteur qui lui, fixe son téléphone. Roulement des yeux je lance dans un soupire :

- Non, enfin, comme tout le monde j’ai étudié ici, mais ça s’arrête là.

Et heureusement finalement.
La barista annonce le prix, je dépose un billet en lui signifiant de garder la monnaie d’un geste de main.

- Merci, ce fut un plaisir d’aider une demoiselle en détresse.

J’attrape mon café et m’apprête à lui emboiter le pas, piquée par cette appellation.

- Hey !

Puis paf, un nouveau drame dans cette journée, décidément,

- C’est pas de chance ça.

J’attrape une chaise, pose mon verre et profite de ce moment pour rattacher mes chaussures.

- Et en plus tu t’excuse. Dis-je en riant. Non mais attends.

Je me relève, attrape mes effets personnels et reprends la discussion suffisamment fort pour être entendue.

- Il te rentre dedans, et tu t’excuses ! Pourquoi pas lui faire un tuto de comment marcher droit et éviter les obstacles simultanément.

Arrivée à la hauteur de l’amateur de café j’attrape son t-shirt du bout des doigts pour observer les dégats,

- C’est pas joli joli, heureusement tu aimes le café, mais quand même.

Je ne vais certainement pas lui proposer de régler ce problème, bien sur le nettoyage de taches ça me connait ! Je finis par lâcher le tissus humide et passe devant, imposant la galanterie.

- Donc avant que monsieur deux pieds gauches ne te rentre dedans je disais : je ne suis pas une demoiselle en détresse.

Je sors dans un tintement de cloche du café en tenant la porte.

- Enfin, pas habituellement.

Eh bien il s’en pose des questions ! Ca me fait rire, mais je ne lui dévoilerai pas tout, certainement pas.

- Pas habituellement.

Il devra se contenter de ça, après tout ça ne le regarde pas.

- Effectivement, j’ai été au Consortium. Ça a été une véritable surprise pour moi, mais finalement c’était plutôt sympa.

Je ne considère pas cette époque comme la meilleure partie de ma vie, mais ça s’est mieux passé que je ne l’aurais cru en apprenant que ma famille était d’origine magique, et que moi-même je serai à l’origine de la magie de mes descendants.

- J’en déduis que toi aussi ? Ca m’étonne de ne pas me souvenir de toi.

Le beau blond était il du genre discret ou étais-je encore focalisée sur ma propre personne pour ne pas m’en rappeler ?

Les échanges se font d’un pas posé, presque agréable. Je souris, café à la main et me retourne pour lui tendre la main :

- Je m’appelle Astra, et toi Monsieur le héros café sucré ?

Je ne sais pas quel nom de famille lui présenter donc je m’abstiens. Ma lignée au double nom de famille est plus connue que je ne le pensais dans le coin. Dans le monde magique, l’association Lesath – Ellison est presque automatique, il n’y a que les sans pouvoirs qui ne sont pas mis au parfum de cette mascarade.

- Et toi alors ? Tu viens d’ici ou c'était pour les études ?

Je commence à m’intéresser en reprenant mon pas léger. Les passants qui osaient porter un œil rempli de jugement sur mon acolyte saveur café se prenaient un regard noir.

Alexander Ward, mes yeux expriment la surprise, ni bonne ni mauvaise. Simplement l’étonnement d’être avec Quelqu’un. Je ne savais pas que les Ward étaient encore si fiers de leur nom. En tout cas lui semble l’être.
Après tout le passé est passé, je pense que moi aussi au fond j’adorerais cette renommée de fouteur de trouble si j’étais dans sa peau d’homme musclé.

- Evidemment.

Qu’il vient d’ici. Enfin, ça c’est parce que l’histoire l’a choisi. Un peuple différent et le beau blond ne serait pas là à me parler avec sa tâche de café.

- Je ne me rappelle pas de toi non plus.

Je serais presque vexée, mais c’est de bonne guerre.

- Je me mélange rarement aux étudiants. Je pense qu’avoir un Dark Minder dans son sillage, ça fait peur à pas mal de sorciers.

J’avale une gorgée de café avant de répondre avec nonchalance.

- Mh, c’est idiot, parce qu’être dans les mouchoirs d’un dark minder ça peut-être un réel avantage.

Je glisse un doigt sur ma lèvre supérieure pour en retirer la sensation humide laissée par la boisson amère.

- Et puis si on partage la même école ce n’est pas pour rien. Je n’ai jamais compris ces scissions, même réunis sous le même toit, nous réussissions à nous diviser !

Si on regarde bien, les fées trainaient avec les fées, les sorciers avec les sorciers, les DM… avec les DM.

- Heureusement qu’il y avait les fêtes d’étudiants pour se mélanger un peu.

J’aimais bien les fêtes de l’époque, c’était le seul moment ou on pouvait se lâcher.

Alors que j’exprime haut et fort mon opinion, comme toujours, je vois le doux paysage côtier se rapprocher de nous. Que c’est beau…

- Si t’es plus au Consortium, qu’est-ce qui t’amène dans le coin ?
- Ça.

Je pointe du menton la mer encore loin de nous.  

- Ce paysage bleu, propre et limpide qu’offre Fairwood est mon préféré. Ça vaut clairement la peine de venir ici rien que pour l’admirer.

Et lire un courrier de la manière la plus télé Novella possible.
Je jette un œil amusé vers l’héritier Ward.

- Vous avez fait du beau travail.

Evidemment je plaisante, je sais que les fondateurs n’ont pas monté ce lieu brique par brique à l’ancienne. Je préfère me cacher derrière cette réplique plutôt que d’amener plus de ma sensibilité dans la conversation.

Je jette quelques regards en biais à mon interlocuteur, il a vraiment l’air de trouver la paix en ces lieux.
Je réfléchirais presque à investir maintenant qu’il en parle, mais les petites villes très peu pour moi, et les jolis appartements... ça dépend de la taille ! Je ne voudrais pas me sentir à l’étroit comme dans les dortoirs de l’époque !

- Après, faut aimer le côté tranquille des petites villes insulaires…
- Oui, c’est bien pour les vacances !

Une résidence secondaire ce n’est jamais de trop, si monsieur Ward a des connaissances autant les rencontrer.

Mais le sujet dévie, la philosophie se joint aux brises salées du port et le sourire du Ward s’étire.

- Non effectivement tu n’as pas l’air fan du concept. Mais si tu aimes surprendre, comme moi, ce n’est pas pratique d’être visible et connu de toute une ville.

Je remets une boucle rebelle derrière mon oreille.

- Mais il en faut, des gens comme toi, attaché à leur petite ville natale… Sinon on aurait jamais créé les films de Noël.

Je le taquine, mais est-il seulement à la page pour comprendre cette blague ? Il doit bien y avoir une fille dans son entourage qui l’aurait introduit.

- Il faut cependant reconnaitre qu’être « connu », ça donne du pouvoir, est ce qu’on peut dire que dans Fairwood il est plus facile de devenir influent ?

Surtout en sachant que la réputation nous colle à la peau si j’en crois les rumeurs de l’école.